deuxième jour : le Bon Samaritain

Dimanche matin, foin de repos dominical, tout le monde est pressé d'essayer les pistes de ski, les enfants enfilent combinaisons et grosses chaussettes en quatrième vitesse, et montent en voiture, pas à l'aube mais pas loin.
Dans les derniers lacets avant la station, des voitures sont arrêtées, visiblement pour mettre leurs chaines. Il y a effectivement de la neige sur la route, à partir de là.
Je les imite, je me gare et je sors les chaines et le mode d'emploi livré avec.
Le voici :



Alors oui bien sûr, les 10 étapes vous paraissent limpides à vous, assis bien tranquilles devant votre ordi, mais essayez par -2°C, agenouillés en jeans dans la neige (en vous souvenant que vous n'avez pas acheté de combinaison de ski pour vous parce vous skiez depuis tout petit et ne tombez jamais, ce qui d'ailleurs se révélèra inexact 3 jours plus tard), avec femme et enfants attendant dans la voiture, et un vent pratiquant la violence gratuite en soulevant toute la poudreuse tombée dans la nuit sur le versant de la montagne pour vous cingler la figure et particulièrement les yeux malgré vos lunettes de myope.
Au bout de 10 minutes, ma compréhension ne dépassant pas l'étape 1, je range les chaines et voyant que des voitures semblent passer sans chaines (ouais je me disais bien que peut-être ils avaient des pneus neige ou je sais pas quoi de pas visible), je décide de tenter les derniers lacets sans chaines.
Et j'ai failli réussir, en roulant doucement et continuement.
Sans un abruti qui s'est arrêté devant moi sans raison, m'obligeant à stopper de même, et sans pouvoir repartir.
Lui repart.
Je ressors les chaines et le mode d'emploi à la con.
Pendant que je continue de tremper mon jean à genoux, la voiture se met à glisser en arrière, avec les enfants dedans. Stupidement j'essaie de la retenir avec mes petits bras musclés, ce qui ne lui fait ni chaud ni froid. Coup de bol le volant était à ce moment là légèrement tourné, et au lieu d'aller cogner la voiture de derrière, elle va cogner le trottoir aimablement disposé là par la DDE et s'y arrêter 20 cms avant le pare-chocs de l'autre voiture (dont les propriétaires s'escriment eux aussi avec des chaines).
Je vous mettrais bien "à suivre..." pour raconter la suite demain mais ce serait pas très sympa...
Donc résumons, j'ai les chaines sur les bras au lieu des pneus, tirouquin pleure de peur dans la voiture, et en plus la ouature en glissant est tombée dans l'ornière entre la chaussée et la sorte de trottoir qui l'a stoppée dans son envie de liberté.

Quand soudain un type sorti de nulle part se penche vers moi et me demande si je sais mettre des chaînes.
Mouarf
Devinant ma réponse muette il me la prend des mains et l'installe en 3 gestes sûrs, tout en m'expliquant la manoeuvre. (Un émule de Mao, me dis-je, il ne me donne pas seulement du poisson, il m'apprend à pêcher).
Il va pour me faire l'autre pneu mais dans l'ornière où il repose, spa possible. Alors il réquisitionne les gens de la voiture derrière pour pousser la mienne, met la chaine au pneu dégagé ainsi, puis sans attendre de remerciements va leur expliquer à eux aussi comment on met des chaînes.
Je rappelle qu'il fait ça tête nue et mains nues alors que les blizzards sur Pluton doivent être plus indulgents que les conditions locales.
Monsieur le Bon Samaritain, si vous me lisez, vous m'avez redonné espoir dans le genre humain.

Ce qui est con aussi, c'est que tout le reste du séjour, je n'aurais pas besoin de remettre ces foutues chaines, il ne neigera plus. Mais maintenant je sais, et c'est hyper plus simple que ce que la notice de montage essaie de nous faire croire.

ça fait déjà bien long à lire, tout ça, alors cette fois, je le mets :

à suivre...