10 mai 2008

courir après des chimères ne rend pas plus riche

Une centaine de mètres après le départ le trajet empruntait un joli sentier de sous-bois où on ne pouvait avancer qu'à un de front.
Que se passe-t-il quand 371 coureurs veulent s'y engouffrer à peu près en même temps ?
oui ça fait un embouteillage sylvestre et pédestre, rarissime mais l'humanité a toujours fait preuve d'imagination.
Ai pas regretté de ne pas m'être échauffé, les premières minutes ont joué ce rôle à merveille : un peu de marche, un peu de pas de gymnastique, beaucoup de piétinement.

Partis dans les derniers et bloqués par un bouchon presque francilien on ne risquait pas de rattraper un jour les premiers mais comme c'était pas notre objectif...

Quand la densité de coureurs au m² se fut nettement réduite on adopta le rythme de croisière du plus expérimenté d'entre nous.
A la première côte j'ai appris une règle inconnue de moi : il ne faut pas ralentir en montée (avec son corollaire : ne pas accélérer en descente) et garder toujours la même vitesse.
Ah.
Bon.
Pourtant c'est drôlement tentant.
Et le copain il avait un régulateur de vitesse interne intégré, c'est pas possible autrement.
J'ai suivi parce que j'avais pas le choix, mais à chaque fin de côte j'étais au bord de l'asphyxie, l'air refusait fermement d'entrer, mon souffle ne voulait plus sortir, en représailles.

J'ai suivi aussi parce que c'était un peu la pagaille dans les balisages, il y avait 2 courses en même temps, la nôtre de 8.5 kms et une de 19 kms pour les masochistes, mais plutôt que faire simple en doublant le parcours pour les fadas, il y avait des bifurcations de temps en temps pour les 19 kms, qui reprenaient ensuite le même parcours que nous, nous dépassant alors à toute allure, tout rouges d'efforts inhumains comme si y avait quelque chose à gagner à l'arrivée.
Ce qui était peut-être le cas pour ce que j'en savais.

Après avoir dépassé 2 pancartes indiquant "6 kms" (déjà parcourus ? encore à parcourir ?) distantes de bien 1 km l'une de l'autre, j'ai renoncé à essayer de savoir où on en était, et j'ai surveillé ma montre en faisant confiance au pro qui nous affirmait qu'on galopait "sur la base de 55 minutes".

Les minutes en question défilaient encore plus lentement que pendant les surveillances d'examen sans jolie étudiante à contempler, mais tout a une fin, parait-il, et j'ai reconnu la route menant au stade d'où on était parti.

Glop glop, me suis-je dit.

Moins glop la déclivité épuisante de la route en question, avec un soleil étouffant qui décidait enfin de venir voir la course, et les copains qui ne ralentissaient pas l'allure d'un micron/heure.
Je m'accrochais à la vue de la ligne d'arrivée et au moment de quitter la route pour entrer dans le stade olympique, un malade sadique d'organisateur nous a indiqué que le parcours faisait encore plusieurs centaines de mètres par là-bas.
avec un geste vague de la main.
surpris mais obéissants nous avons obtempéré.
Personnellement je l'aurais bien empalé et enduit de crême de marrons pour se faire dévorer par les fourmis d'Amazonie du film qui m'avait terrorisé quand j'avais une dizaine d'années, mais j'avais pas le temps.

C'était quand même le coup de grâce, j'avais perdu la foi qui me soutenait jusque là, j'ai ralenti malgré moi, et les copains m'avaient mis 20 mètres dans la vue quand on a fini par nous autoriser à passer la ligne d'arrivée, recevoir un tee-shirt, une bouteille de jus de pommes, deux superbes autocollants (cf image de début de billet) et plein de pubs pour d'autres courses (il a un grain le type qui a estimé que c'était le meilleur moment pour faire ce genre de publicité).

J'étais tellement maître de mes facultés intellectuelles à ce moment que même en la faisant répéter 2 fois je n'ai compris qu'une heure après que la fille préposée aux tee-shirts me demandait la taille que je faisais.

Au jugé elle m'a donné la taille L, qui me va plutôt pas mal, preuve qu'elle a bien deviné que j'étais un gros con. Il n'empêche que c'est pas exactement avec ça que je vais pouvoir parader en me vantant, à cause du nom du club organisateur, nom plein d'humour mais dans le genre autodérision.

J'ai passé la ligne d'arrivée 56 minutes après le départ. Les premiers de ceux qui couraient 19 kms sont arrivés moins de 20 minutes après, ce qui dégouterait un peu si j'en avais quelque chose à fiche.

Il est apparu peu à peu qu'il y avait eu des gros soucis sur les 2 trajets, les organisateurs ont palabré une heure sous la tente en fumant le calumet de la perplexité, avant de décider d'annuler tous les classements, de garder leur moches superbes coupes plaquées or et argent, et de distribuer tous les lots par tirage au sort.

En conclusion j'ignore à quelle place je suis arrivé, je sais combien de temps j'ai couru parce que j'avais ma montre mais je ne suis même pas certain de combien de kms on a fait, le pote pro affirmant que ça tournait plutôt aux alentours de 9.5 kms.

Et on n'a rien gagné, ni au tirage ni au grattage, même pas une paire de chaussures de sport ou un panier garni, ni un billet d'avion Poitiers-Ajaccio pour une personne (j'en aurais fait quoi ? je me demande même si c'était un aller-retour; d'un autre côté un aller simple peut suffire pour aller en Corse quand tu as le malheur de pas être corse), ni une nuit dans le château-hôtel local (très utile à 20 minutes de chez moi), et encore moins le séjour d'une semaine en Tunisie (je mourrais sans avoir jamais vu le désert, snif).

Ah si, j'ai gagné une ampoule au pied.

On s'est consolé en dévorant un énorme pique-nique avec les femmes zet enfants nous ayant rejoint après leur grasse-matinée. (Les femmes zet enfants de jadis seraient venus nous supporter et acclamer sur le bord du chemin mais tout se perd, ma bonne dame).

ps : si un amateur ou organisateur de compétitions de courses à pieds manquant d'humour passait par là, j'ai trouvé moi aussi que c'était malgré tout une belle course. C'est juste pas ma tasse de thé, l'esprit compétitif, pas plus que l'esprit grégaire d'ailleurs.

32 commentaires:

Telle a dit…

Ce que je trouve moche, c'est que les lots aient été distribués n'importe comment. Soit il n'y a rien à gagner pour le premier et dans ce cas tout le monde repart content avec des bricoles sous le bras, soit il y a quelque chose à gagner et celui qui vient pour la compétition et la gagne mérite de repartir avec le lot. On dirait qu'il y a comme une hésitation entre randonnée et course.

Quant aux femmes et enfants sur les bas-côtés à acclamer le chef de famille, j'en connais un autre qui regrette le bon vieux temps, crois-moi !

Anonyme a dit…

Cette course m'a l'air moins dangereuse que le kayak, et pour l'instant vous n'avez pas attrapé la crève !

Anonyme a dit…

Comique ton hitoire!!!
A-t-on retrouvé les petits farçeurs?
Et puis je te rassure, moi non plus je n'ai aucunement l'esprit de compétition!

Anonyme a dit…

ahhhh tirui ...tu es mon heros !!!!!!



moi je serais venue t'encourager.....

Anonyme a dit…

j'accepte tagadas et meme, meme dragibus.....

Anonyme a dit…

"Tout le malheur des hommes vient de ce que qu'ils ne savent rester en repos dans leur chambre devant leur ordi"

Anonyme a dit…

Tu as souffert mais qu'est-ce-que tu racontes bien ! Et puis le T.shirt fait un beau "pyjama souvenir"... ou un début de collection...
Margot

Bismarck a dit…

Moi, j'aime pas courir...
Même s'il paraît que c'est bon pour le rythme cardiaque et même pour le cerveau (en fait, c'est peut-être pour ça que je suis nulle en maths).
Bravo à toi!

tirui a dit…

telle, pour autant que j'ai tout compris, les lots de valeur comme le séjour en Tunisie auraient été tirés au sort de toute façon, je suppose pour respecter le statut de course amateure. Les lots pour les 1ers arrivés dans chaque catégorie devaient être plus symboliques qu'autre chose, outre les coupes.

cesbee, mis à part le risque d'infarctus la course à pieds de ce style est moins dangereuse que le kayak, et effectivement je n'ai pas eu la crêve ensuite, ni courbature, ni douleurs.

lul'oups, je n'ai pas eu d'autres échos que l'article de journal, donc je n'en sais pas plus que vous. ça restera un mystère non éclairci, au moins pour moi. (et vous)

cahuette, ma belle-mère dirait que tu es trop intéressée pour être intéressante :-D

pmb, le probleme c'est qu'on ne peut pas non plus trouver le bonheur en restant devant son ordi...

merci Margot, et effectivement le tee-shirt me plait si bien que je ne l'ai pas quitté depuis 3 jours ;-)
(il ne fait pas encore assez chaud pour qu'un simple tee-shirt me serve de pyjama, mais ça viendra)

bismarck, il n'y a pas grand chose qui soit bon pour nos coeur, cerveau, et autres parties du corps, et qui soit en même temps agréable et sans fatigue. Il faut alors choisir de tous ces maux les moindres. Pour mon cerveau c'était les maths, et pour mon coeur le jogging. Pour toi c'est surement plutot d'autres activités.

Laeti a dit…

Finalement le kayak c'était bien plus drôle (au moins pour nous !)

Les Pitous a dit…

Tout de même tu as assuré grave sur ce coup: premier article-teaser bien ficelé pour faire un buzz et après tu attends tranquillou pour nous donner la chute!

Ce qu'il manque dans ce récit c'est un schéma des courses initialement prévues, puis en superposition le parcours réellement effectué par les coureurs. J'imagine bien le dessin que Gotlib aurait pu en faire.
V.

Anonyme a dit…

"pmb, le probleme c'est qu'on ne peut pas non plus trouver le bonheur en restant devant son ordi..."

C'est vrai plus que vrai. N'empêche que c'est grâce à mon ordi que j'ai reçu un mail de merci d'une élève perdue de vue depuis 25 ans (elle avait trouvé mon adresse sur un blogue).

Que la fille d'un chanteur vu deux fois il y a 35 ans, dont le disque est de ceux que j'emmènerais sur une île déserte (Paul Barrault), vuet me contacter...

(Les pitous : il nous manque surtout les photos de la bêêête...)

Névrosia a dit…

"le probleme c'est qu'on ne peut pas non plus trouver le bonheur en restant devant son ordi"
Amen !
En tout cas chapeau, je n'aurais certainement pas eu le courage de faire cette course, j'aurais été de celles qui apportent le pique-nique. :-)

cerolinet--blog[at]yahoo.fr a dit…

Héhéhé trop fort le nom du club ! Non vraiment fallait oser ! :o)
Et sinon, l'histoire ne dit pas si tu as réussi à redorer ta réputation de sportif ?

Les Pitous a dit…

Je suis bien d'accord: les coupes sont la plupart du temps hideuses et d'un réemploi très discutable. Pot de fleur, pot pourri, vase... rien de bien convaincant. Heureusement, la fierté du sportif récompensé le fait chérir l'inutile objet, nous évitant un encombrement massif dans les vide-greniers, brocantes ou sur y-paie.
Mais tu n'es pas ainsi, toi qui cours sans rechercher la gloire.
V.

PS: une photo de la bêêête! (mais quelle bête?)

tirui a dit…

laeti, toutes mes excuses je n'avais pas compris que je devais à mes lecteurs de choisir mes activités sportives en fonction de leur potentiel comique. L'an prochain je m'inscris en haltérophilie pour funambule, ça devrait le faire. :-)

Pitou V., pour le dessin il faudra demander à Gottlib, et de toute façon je n'ai pas vu le moindre schéma du trajet, et au bout du 3e virage j'avais perdu mon sens limité de l'orientation.

pmb, si y a que ça je mettrais des photos de bête dans le prochain billet sans faute.

névrosia, si on t'avait donné un ballon de basket et installé un panier à l'arrivée, tu l'aurais faite sans t'en rendre compte, la course. :-D

cely, l'histoire ne dit jamais tout, il y a toujours des zones d'ombre. Pour ma réputation je suppose que les copines admettent désormais que je suis presque un sportif.

pitou V. bis, je revendique plutôt fièrement de n'avoir jamais gagné au cours de mon existence la moindre coupe ni la moindre médaille, et toujours interdit à mes enfants d'en rapporter à la maison. Quand je pense que certains parents les exhibent sous verre ou les accrochent au mur, je ne peux retenir un sentiment de commisération pour ces pauvres gens. O:-)

Névrosia a dit…

Ben les footings de préparation de saison j'en ai fait (beaucoup trop) et j'en ai fait faire (trop peu), preuve qu'on peut aimer perpétuer les cruautés de ses bourreaux pour peu qu'elles soient efficaces. Mais si ce n'était le plaisir de savoir que je mettrais 10 mètres dans la vue de la fille qui me marquerait pendant les matchs et la nécessité d'avoir une condition physique parfaite pour garder ma place dans le 5, je m'en serais volontiers passée car je déteste ça.
Toi tu le fais sans y être obligé, alors tu conserves toute mon admiration... et pas uniquement parce que j'espère obtenir de toi qui tu me renvoies par mail l'adresse de Tuséoù, pour Tusékoi et Tusékan. Merci O:-)

Anonyme a dit…

quel dommage...
j'aurais bien aimé que tu reçoives un petit prix, un voyage pour UNE personne dans un hotel en face de ta maison, pour "avoir la paix"... 5 minutes !

Anonyme a dit…

Normal que les femmes ne soient pas sur le circuit pour applaudir un mari courreur qui porte 2 magnifiques cornes!!!
pardon Mme Tirui, c'était pour rire!

tirui a dit…

nevrosia, je te renvoie sans faute l'adresse du hammam dans lequel tu veux te livrer à je ne sais quels actes inavouables (mais probablement pas une partie de basket ball) avec moult jeunes femmes délurées :-D

bertrand, à tout prendre une auberge en Ardèche me plairait plus, surtout en cette saison pas encore trop chaude et où tout fleurit là-bas.

dany, ah ce ne sont pas des cornes mais des bois ! ça change tout ;-)
(en vrai madame tirui est allée faire le marché tandis que je courais, puis préparer le pique-nique alors difficile de trop râler sur l'absence de soutien le long de la course)

Les Pitous a dit…

Est-ce à dire que non content de ne pas être un winner (si j'ai bien lu tes réponses à certains questionnaires), tu interdis aussi à tes enfants d'en être?
Et la meilleuritude dans tout cela?

V.

Tic@ !! a dit…

sage?? et comme par hasard tu es présent??
chez moi aussi, il y a un homme déçu de voir ses groupilles prendre l'apéro tranquillement en attendant le retour du vttiste le vé aux aurores pour un T-shirt orange ;-)

Tic@ !! a dit…

le début de mon commentaire:
"si j'ai bien compris un petit malin a déplacé le bali"...

Tili a dit…

Rien ne sers de courir...
J'ai bien rigolé ! :-)

Anonyme a dit…

(suite) ... tu ressembles à mon homme et ça se confirme encore plus sur la fin du 2ème billet : la compétition n'aura jamais eu sa faveur même si ... il a fait et organisé des courses dans le passé. Il ressentait toujours un certain décalage avec les autres participants ! Etonnant ?!
Enfin lui sa femme était sur le parcours. Forcément il courrait pendant nos vacances :)

tirui a dit…

pitou V., étant justement passé par les filières d'excellence, je suis bien placé pour méprisé la meilleuritude obligée. (encore que lorsqu'ils me rapportent un prix au rallye latin, là je ne dis plus rien)
O:-)

tic@, je jure devant Dieu et tous ses saints que je ne suis pas le petit rigolo qui a joué avec les balisages de la course. ça n'aurait servi à rien, je ne serais jamais arrivé premier pour autant :-D

tili, l'inutilité absolue de l'action de courir fait partie de son charme, limité certes mais réel. ça compense presque le fait que ça fatigue plus que la marche.

madeleine, la ressemblance n'est pas totale, il est hors de question que je me fatigue à organiser quelques courses que ce soit, je suis bien trop paresseux :-)

Névrosia a dit…

:-D Je te saurais gré d'éviter de me prêter en guise d'intentions, tes fantasmes les plus softs.

tirui a dit…

nevrosia, on ne prête qu'aux riches, y compris en matière de fantasmes :-D

Anonyme a dit…

Mais en fait tu es un GRAND sportif, hein!

tirui a dit…

que nenni, sosso, je suis un petit sportif, par la taille et par la valeur. ;-)

Anonyme a dit…

Tout pour ne pas nous donner envie de nous joindre à la masse ;-)

tirui a dit…

fallait essayer, dans certains cas la masse donne naissance à la convivialité, la solidarité, la bonne humeur ou la fête ;-)